Habiter la montagne, habiter la forêt

Les rencontres de la Haute Ecole du Bois et de la Forêt

Guillestre (Hautes Alpes) – 2-8 juillet 2023

Une Haute École du Bois et de la Forêt est actuellement en projet dans le département des Hautes Alpes. Un premier pôle de compétences organisé autour de quatre parcours métiers (production, construction, vente/marketing, génie forestier) sera situé à l’Argentière-la-Bessée.Un second pôle dédié à l’architecture de montagne sera créé à Embrun. Cette école souhaite permettre l’acquisition de compétences croisées sur le bois et la forêt afin de développer une vision systémique du milieu forestier – de la gestion forestière aux procédés de construction bois – pour accompagner les professionnels futurs et en activité face aux mutations de notre siècle tant écologiques qu’économiques et sociales.

Afin de préfigurer son ouverture et d’initier les réflexions, les communautés de communes du Pays des Ecrins, du Guillestrois-Queyras et de Serre-Ponçon organisent une école d’été pluridisciplinaire visant à interroger les relations entre la forêt et l’habitat dans le contexte spécifique des Hautes Alpes. Face aux crises que notre siècle traverse, en particulier le dérèglement climatique, la surexploitation des ressources et le creusement des inégalités sociales, cette école d’été propose de réinterroger la nature des relations que nous souhaitons tisser avec la forêt et le bois pour mettre à l’épreuve nos visions d’avenir :

Quelles représentations, quels imaginaires, quels usages et quelles formes réinventer pour habiter les Alpes demain ?

Pour apporter des éléments de réponse à cette question, nous mettrons en projet un échantillon du territoire haut alpin, représentatif de la diversité des réalités territoriales et sociales existantes, sur lequel nous développerons trois scénarios, chacun considérant la forêt sous un prisme différent :

1. La forêt comme ressource

Ce scénario aura pour objectif d’interroger l’échelle de la filière. En effet, considérer la forêt et le bois comme ressources interroge leurs conditions d’exploitation et leur utilisation. L’arc alpin peut-il être considéré comme une échelle « locale » ? Si oui, quelles logiques de coopération imaginer entre les intercommunalités et les pays, tant du point de vue des compétences que de la ressource en elle même ? Comment ces réflexions se matérialisent du projet de territoire à l’architecture ? En apportant des réponses à ces questions, ce scénario cherchera ainsi à esquisser des manières d’optimiser la ressource à différentes échelles pour montrer comment l’industrie innovante peut-être mise au service des territoires et de ses usagers, dans l’idée de rendre la ressource accessible au plus grand nombre tout en respectant ses cycles de production.

2. La forêt comme réserve

Ce scénario aura pour objectif d’interroger les limites de l’exploitation et des usages de la forêt et du bois. Quelle est notre capacité à préserver la forêt de l’action humaine ? Comment utiliser « moins » tout en répondant à un besoin d’accueil de nouvelles populations ? Comment réparer les paysages ayant été malmenés par l’action humaine ? Par la recherche de réponses à ces questions, ce scénario nous amènera à explorer le potentiel d’autres ressources que le bois et la forêt, en esquissant des articulations possibles entre les filières locales de matériaux de construction et les processus de réemploi. Considérer la forêt comme une réserve nous permettra aussi de développer une vision paysagère du territoire, mettant notamment à l’épreuve le concept de forêts en libre évolution pour susciter le débat quant à nos relations avec la nature.

3. La forêt comme jardin

Ce scénario interrogera plus particulièrement les usages à conserver, abandonner et introduire pour une meilleure cohabitation entre humains, faune et flore. Comment repenser les valeurs sociales et productives de la forêt et les formes qui y sont associées ? Quelles méthodes et pratiques mettre en place pour la valoriser comme un bien commun pour le vivant ? Comment aller au-delà de l’opposition dialogique classique du domestique et du sauvage ? Regarder la forêt comme un jardin à ménager nous permettra de remettre en question nos modes d’habiter, en interrogeant de manière systémique nos modes de consommation, de production, de construction. Ce scénario sera l’occasion d’éprouver le concept de forêt multifonctionnelle et ainsi d’explorer les usages pouvant cohabiter ensemble.

 

A l’issue de l’école d’été, ces trois scénarios nous auront permis de mettre en lumière et en discussion les échelles, les limites et les équilibres de la filière bois
et forêt. Utilisés comme matière à débat, ils auront pour objectif d’ouvrir des voies de négociation possibles entre des logiques productrices et préservatrices, ancrées dans une vision d’avenir résolument écosystémique des usages du bois et de la forêt.